Journées d’étude JCSA 2020

16 & 17 janvier 2020

Sujets et enquêtes en Sciences Humaines et Sociales

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Dans la continuité des journées d’études de 2019 qui examinaient les présences et les rôles des affects dans la recherche en sciences humaines, l’édition 2020 souhaite interroger ce point inaugural de toute expérience concrète de recherche : qu’est-ce qui de nous, nous engage dans la recherche ? Plus précisément, il s’agirait d’étudier comment nos expériences sensibles concourent à l’élaboration de la connaissance, comment la scientificité des sciences humaines et la constitution de savoirs fondés sur des méthodes définies, sont imprégnées d’abord par la reconnaissance de vécus à partir desquels peut se constituer la visée d’un travail. Comment, en outre, la définition de nos champs de recherches rend compte de notre subjectivité sans pour autant qu’ils ne dérivent ipso facto de notre subjectivité ?

Suivant cette perspective plusieurs thématiques peuvent être déclinées. Nous en proposons là quelques amorces non exhaustives qui trouveront une richesse dans la singularisation que chacune et chacun des participants voudra bien y apporter.

– La mise à distance.

Dans Engagement et distanciation, Norbert Elias examine cette dialectique constituante entre le sujet et les formes sociales. Ainsi écrit-il : “c’est la tâche des chercheurs en sciences sociales que de trouver les moyens de comprendre les configurations mouvantes que les hommes tissent entre eux, la nature de ces liaisons ainsi que la structure de cette évolution. Les chercheurs sont eux- mêmes inscrits dans la trame de ces motifs. Ils ne peuvent s’empêcher – car ils sont immédiatement concernés – de les vivre de l’intérieur ou par identification.” Tout en reconnaissant la nécessité première de ces liens, comment pouvons-nous en décliner des modèles pour une analyse objective ? Comment par ailleurs, éprouver des méthodes sans craindre d’en orienter, malgré soi, les résultats ?

– La position.

Dans son ouvrage de sociologie visuelle, Ce que regarder veut dire, Daniel Van der Gucht élabore une méthode d’investigation sociologique à partir du regard en insistant d’abord sur l’importance d’une conscience de notre position d’observateur. Elle permettrait à la fois de rappeler que l’être est “être-au-monde”, et de baser l’objectivité scientifique dans la responsabilité quant à ce qui nous lie aux valeurs, ”afin de neutraliser autant que possible les effets de notre subjectivité”. Mais pouvons-nous résoudre l’impact du sujet à la question d’une méthode ? Et comment celle-ci peut- elle nous garantir toutefois qu’au terme d’une argumentation clarifiée par l’énoncé premier de notre position, nous ne nous laissions en déduire des conclusions “allant de soi” ? (Raymond Bou- don)

– L’expérience

En partant de ce qui est proposé par François Dubet, nous pouvons dire que, si l’on part du sens commun, on peut affirmer que le concept d’expérience n’est qu’une notion ayant un sens vague et ambigu. Ceci, car elle nous renvoie vers deux genres de phénomènes que – au premier abord – l’on pourrait désigner comme contradictoires. D’un côté, nous avons l’expérience en tant que façon au travers de laquelle l’acteur découvre une subjectivité personnelle lorsqu’il éprouve le monde : état émotionnel, manifestation individuelle, et irrationnelle, voire mystérieuse, au travers de laquelle l’acteur incorpore le monde par le biais de ses émotions et ses sensations. Cependant, il existe aussi une signification de l’expérience que l’on pourrait désigner comme activité cognitive au travers de laquelle l’acteur construit le monde (Peter Berger et Thomas Luckmann), et donc le réel, moyennant des catégories sociales qui lui permettent de vérifier – et donc expérimenter – précisément ce monde qui l’entoure. Comment décrire, ou classifier, sociologiquement ce type de phénomènes que l’on désigne comme expériences ?

– L’intersubjectivité.

Enfin, nous pourrions suivre la position de Magali Uhl pour qui la subjectivité n’est pas “un obstacle à neutraliser, éliminer, refouler”, mais plutôt l’occasion féconde d’intensifier la démarche sociologique de la question épistémologique de l’ontologie sociale. Selon cette auteure, la démarche théorique en sciences humaines doit réaffirmer le rôle constituant du sujet, comme garant d’ “une connaissance auto-réflexive, une connaissance de soi, une connaissance où il y a une identité partielle ou totale du sujet et de l’objet dans une interaction dialectique incessante” afin d’articuler de nouveaux champs de savoirs. Mais est-ce qu’une telle démarche, aussi séduisante soit-elle, peut être mise à l’épreuve en toutes recherches sociologiques ?

 

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